La Bibliothèque Municipale de Beniarbeig était une fois de plus pleine à craquer pour la deuxième journée du cycle « Rencontres à Beniarbeig 2025 », consacrée cette année à « Science et Littérature ». La conférence, intitulée « La science dans le roman et la poésie : la littérature dans l'éprouvette », a été donnée par Xavier Duran, chimiste, docteur en sciences de la communication et ancien directeur du programme L'environnement de TV3. Duran, également connu pour sa longue carrière d’écrivain de vulgarisation scientifique et de fiction littéraire, a offert un aperçu fascinant des liens entre la science et la littérature à travers l’histoire.
« Trouver de la science dans la science-fiction n’a pas beaucoup de mérite. Mais qu'en est-il d'auteurs comme Homère, Joanot Martorell, Shakespeare, Dostoïevski ou Marcel Proust ? Comment considéraient-ils les scientifiques ? « Et comment décrivaient-ils et valorisaient-ils les bateaux à vapeur, les chemins de fer, les automobiles, les téléphones, les avions ? », a demandé l'orateur au début de son discours. À partir de cette réflexion, Duran a guidé le public à travers un voyage littéraire intense, révélant de multiples références scientifiques dans des œuvres classiques et modernes de la littérature catalane et universelle.
Pour illustrer ses idées, il a commencé avec le roman Affinités électives Théorie de Goethe, dont le titre vient d'un concept chimique décrit par le scientifique suédois Torben Bergman. Duran a expliqué comment Goethe a utilisé la combinaison d’éléments chimiques (AB+CD=AC+BD) comme métaphore des relations humaines dans son œuvre.
Un autre exemple notable est la référence au passage de l'Iliade décrivant la décomposition du cadavre de Patrocle, une observation qui, des siècles plus tard, inspira les expériences du scientifique Francesco Redi et ses conclusions sur la génération spontanée, prélude aux travaux de Louis Pasteur.
Duran a également évoqué l'extraordinaire résistance physique de Tirant lo Blanc face à sa mort inattendue d'une pneumonie, une contradiction qui lui a permis de réfléchir sur l'évolution de la perception de la médecine à l'époque médiévale. À cet égard, il a cité Ramon Llull, qui déjà dans son Livre de contemplation a mis en garde contre la « nature changeante des opinions médicales ».
La tournée littéraire comprenait également les voyages de Gulliver, avec ses ironies sur les calculs mathématiques, et Frankenstein par Mary Shelley, en relation avec les dilemmes éthiques de la science. Bien que ce dernier travail ait été brièvement mentionné, puisqu’il sera le thème central de la prochaine conférence de la série.
Duran a également souligné la critique sociale dans Temps difficiles de Charles Dickens, qui aborde les dures conditions de travail de la révolution industrielle, et en Middlemarch de George Eliot, qui soulève des dilemmes éthiques concernant la dissection des cadavres et l’accélération de la mort chez les patients en phase terminale.
L'analyse s'est poursuivie avec des auteurs modernes tels que Narcís Oller, qui a reflété dans ses romans l'impact du chemin de fer et de la Bourse sur la société catalane, et Joseph Roth, qui a associé la disparition de l'Empire austro-hongrois à l'apparition de la nitroglycérine. Il a également mentionné Llorenç Villalonga et son œuvre Andrea Victrix, qui anticipait l’obsolescence programmée en situant son intrigue dans un futur (2025) déjà présent.
Le voyage littéraire n’a pas oublié des poètes tels que Guerau de Liost et Ángel Terrón, ni des figures emblématiques comme Primo Levi. En conclusion, Duran a souligné que « la science et la littérature ont toujours été interconnectées et se sont enrichies mutuellement ».
La journée s’est terminée par une discussion animée au cours de laquelle le public a pu débattre et réfléchir sur les idées présentées. La prochaine conférence de « Rencontres à Beniarbeig » aura lieu le 6 mars à 19h30, par la professeure et écrivaine Carme Manuel, qui parlera de « Frankenstein : passé et présent du mythe de Mary Shelley ».








